A la recherche du temps perdu

A LA RECHERCHE DU TEMPS PERDU
Témoignage de confinement /18
par Marie-Liesse, de base 5

L’annonce du confinement a d’abord résonné en moi comme une promesse. Je l’ai envisagé avec régal en me frottant les mains d’avance de tout ce temps disponible, libre, sans contraintes, sans dérangements. Du temps pour moi, du temps pour mon couple, pour notre famille…

C’est inespéré de pouvoir envisager les semaines à venir sans sorties, sans sollicitations, sans pressions. Je vais pouvoir prendre le temps de me consacrer enfin à toutes ces choses qui m’attirent (lectures-couture-peinture…), sans culpabilité et sans devoir me justifier. Là où confinement rime pour beaucoup avec emprisonnement, moi je pense: Liberté! Lectures, couture, peinture, mes projets et aspirations m’apparaissent comme autant de possibles, pouvant enfin aboutir.

Je m’éparpille un peu (flèche 7?) et réalise rapidement que le temps qui nous est rendu reste malgré tout limité. Je vais devoir prioriser, et me consacrer de toute urgence aux révisions de mes cours et rédaction de mémoires. Je réalise tout-à-coup, qu’en bonne type 5, je n’ai fait que deux années de pause – non consécutives – dans les études, depuis l’obtention de mon bac il y a 15 ans. Je multiplie les formations complémentaires, ne me trouvant jamais assez informée, jamais assez rassasiée…

Et puis, l’engouement du début passé, je me retrouve confronté à la réalité du quotidien
confiné, qui m’apparaît terriblement chronophage. Plus encore qu’en temps normal, les
tâches ménagères me sont particulièrement lourdes et leur aspect répétitif m’assourdit. Ce
sont là de véritable petites croix, et je demande la grâce de savoir donner joyeusement,
largement, fidèlement. Les journées passent et j’attends toujours cet oasis du temps-perdu-enfin-retrouvé! La crèche fermée, ma petite fille demande une attention de chaque instant… je savoure bien sûr nos moments partagés, mais je me surprends à attendre sans cesse ce moment où, enfin, je serai SEULE. Je repense alors à cette avarice, démon de mon âme, et m’applique à renoncer sans aigreur, puisque l’Eternel bénit celui qui donne de tout son cœur.

Le piège du confinement? M’avoir fait croire que j’allais pouvoir me garder tout à moi,
m’avoir fait miroiter monts et merveilles de lectures, couture, peinture. Avoir signé un
chèque en blanc à ma soif de solitude, un chèque falsifié. Concrètement, je n’ai plus d’espace à moi. Aux alentours de Pâques, j’étouffe. J’ai besoin de me retrouver, seule. J’ai besoin d’être seule pour penser, pour savoir où j’en suis et refaire mes forces. Et puis je n’en peux plus de notre quartier bétonné. La montagne se fait si belle avec le retour du printemps, nous l’apercevons à chaque fenêtre de notre appartement! J’ai aussi besoin de nature, d’horizons. Et cette attestation qui me donne des boutons! Je ne supporte pas de devoir rendre des comptes, je sens gronder en moi la révolte (flèche 8?).

Je revis lorsque des amis voisins partis se confiner au vert, nous prêtent leur appartement
dans lequel je peux m’isoler pour travailler de temps en temps. Je ne suis jamais aussi
efficace que seule. Un jour, bien encouragée par mon mari, je décide de me remettre au sport et d’aller courir. Quel bienfait! J’essaie de garder le rythme depuis, et de faire de temps en temps quelques respirations Vittoz, en pleine conscience de mon corps. Voilà mon petit chemin d’incarnation. Disons que le confinement en aura fait une urgence.

La date du 11 mai agit comme une piqûre de rappel, un compte à rebours… J’appréhende le
flux des dîners et autres sorties autant que je les espère… Oui, j’ai hâte de retrouver ceux
que j’aime, d’échanger et de partager, mais c’est plus fort que moi, je me prépare déjà à l’assaut…

Une réflexion sur « A la recherche du temps perdu »

  1. duP

    Merci Marie-Liesse 😉
    À propos de cette tension avarice/générosité, je me demande où est la frontière entre le besoin et la vertu. La solitude est un besoin quasi vital pour un 5, et je ne trouve pas évident le discernement de la limite entre l’écoute de ce besoin et le don de soi par la présence aux autres… Ça se joue dans notre conscience, mais pas si évident

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