RECONNAÎTRE LE NÉCESSAIRE
Témoignage de confinement /21
par Giovanna, de base 6 en social
Comme une base 6 prévoyante et clairvoyante, j’écoute avec attention les informations qui m’arrivent de ma famille en Italie. Je pense que ce maudit virus ne va pas s’arrêter aux frontières et que bientôt il arrivera chez nous. Je n’avais pas tort. Je commence à pratiquer les gestes barrière bien avant que ceux-ci soient imposés en France. Dès la fin février je nettoie, je stérilise, je ne touche plus rien au travail, je désinfecte mon bureau, les tables des cours, j’impose la distanciation sociale… Je me fais prendre pour une stressée car ici, tout va bien, la France va gérer, elle est prête. Je me méfie et j’en fais qu’à ma tête jusqu’au jour ou tout s’accélère et le confinement tombe comme un véritable coup de massue. Pour les autres, pas pour moi. Je m ‘y attendais et probablement mon deuil de la vie d’avant avait déjà commencé. Je n’ai pas cédé à aucune forme de panique collective: pas de folles courses pour remplir ma maison de conserves et papier toilettes, pas de plein de gas-oil, ni de boîtes de Doliprane. J’ai gardé un étrange sang froid et je me suis dit que je pouvais sûrement compter sur mon mari, que je pense être de base 1 en survie.
Rester confinée, enfermée chez moi… cela me faisait davantage peur. Cette idée m’a toujours rebutée. Je suis une 6, sociale et j’ai besoin d’être en contact avec les autres. Mon oxygène est de vivre avec et à travers les autres, au delà des confines étroits des quatre murs de ma maison. Comment y songer? Comment y arriver? Surprise: je me suis adaptée très vite avec un certain fatalisme que je ne me connaissais pas. Rester chez moi, avec mes hommes, ce n’est pas mal. Un mari que je ne voie pas souvent car toute la journée à Paris pour le travail, des grands garçons à l’école… et là nous sommes tous réunis, tous ensemble. Une nouvelle organisation se met en place, presque naturellement. Chacun crée son petit espace de travail pour étudier et télétravailler, le tout intercalé par des moments forts de partage. Les repas, les pauses détente, le sport, la musique, le film, une de mes grandes passions, ou la série adorée de mes enfants, le tout rigoureusement en famille avec de longs moments de réflexion et de discussion.
Ces occasions d’échanges et de partage se multiplient, les tensions s’assouplissent, nous allons revenir à l’essentiel et aux valeurs profondes de la vie. J’ai comme l’impression que ce confinement est en train de nous faire un grand bien. Je retrouve ma famille. C’est un sentiment fort accompagné de belles émotions. Je compense le manque de vie sociale en appelant souvent mes proches en Italie, mes amis et mes étudiants avec qui j’ai gardé le contact. Je me suis découverte capable de gérer l’informatique et je donne mes cours via Skype et d’autre logiciels de communication. J’enregistre des vidéos et des exercices vocaux. Tout est nouveau mais aussi excitant. Je ne cours plus, je me pose, je réfléchis, je savoure, je prends le temps et surtout, je ne me projette pas. Je vis le jour le jour et je goûte aux petits plaisirs que le quotidien m’offre. Avec gratitude et espoir.
Vittoz nous aide beaucoup dans tout cela. Chaque jour est vécu en acte conscient. Chaque jour a sa beauté et sa grâce et je remercie d’avoir la chance de vivre à Fontainebleau, au calme et entourée par cette belle nature. Une nature qui nous réconforte, nous apaise et nous montre avec délicatesse et justesse combien la vie est belle. Dans ma nouvelle havre de paix je ne me sens pas prisonnière mais libre, étrangement libre. Quelqu’un a écrit « La liberté, c’est savoir reconnaître ce qui est nécessaire », et bien je trouve qu’en cette période de confinement, nous avons le temps de réfléchir profondément à ce qui nous est vraiment nécessaire. Cette expérience ne nous laissera pas indemnes; je sens qu’au moment venu, nous allons quitter notre confinement, notre refuge, pour reprendre une vie qui ne sera plus la même et dans laquelle nous allons nous découvrir changés, plus forts et meilleurs.